Avant la dynastie des Qing,
nous avons conservé peu de traces d'arts
ayant un rapport direct avec les pratiques martiales
chinoises d'aujourd'hui.
Les principaux embranchements sont nés
de la diversification du Wushu sous les Qing
Une terminologie est apparue dans les traités
de la dynastie Ming.
La distinction la plus intéressante
est celle qui oppose "l'école externe"
(waijia), considérée d'obédience
bouddhiste en raison de son rattachement au
monastère Shaolin, et de "l'école
interne" (neijia) dont le berceau mythique
serait le mont Wudang.
Shaolin et Wudang, symboles
d'une opposition proverbiale entre d'une part
une pratique fondée sur la puissance
musculaire et d'autre part l'application au
combat de principes stratégiques et énergétiques
considérés supérieurs.
Le Dictionnaire cihui la résume ainsi:
"Le travail "interne" (neigong)
préserve la tranquillité au sein
du mouvement et insiste sur la défense
alors que le travail "externe" (waigong)
se fonde sur l'action qui se manifeste par l'attaque".
Si les écoles martiales du courant externe
plongent pour la plupart d'entre elles leurs
racines dans les associations de boxeurs du
monde rural et s'appuient sur une transmission
orale, l'ensemble des théories qui sous-tendent
la pratique de l'école interne repose
sur des écrits de lettrés de la
dynastie Qing:
-le Wang Zhengnan muzhiming, ou Epitaphe à
Wang Zhengnan, de Huang Zongxi;
-le Taiji quan pu, ou Recueil du Taiji quan,
de Wang Zongyue
-le Neijia quanta, ou Méthode de boxe
de l'école interne, de Huang Baijia
-le Changshi wuji, ou Livre des techniques martiales
de la famille Chang, de Chang Naizhou
-les traités de la boxe Taiji de Wu Heqing
(Yuxiang), Wu Chengqing, Wu Ruqing et Li Yiyu
-le Chenshi Taiji quan tushuo ou Explications
illustrées de la boxe Taiji de la famille
Chen de Chen Xin etc.
Les secrets du Mont WUDANG
La boxe Wudang est un courant
opposé à la boxe Shaolin, le Wudang
quan. C'est seulement à la fin du siècle
dernier que le Taï ji, le Ba Gua et le
Xing yi Quan se rassemblèrent pour devenir
la locomotive du courant interne, le Neijia
quan.
La légende veut que ce soit le taoïste
Zhang Sanfeng qui soit le fondateur légendaire
de ce courant au 13 ième siecle.
Il réunirait selon un
recensement récent les méthodes
à mains nues suivantes:
1 - le Taiji quan "Wudang Zhaobao sanheyi
" de Liu Huisi;
2- le style Hao de Taiji quan "Wudang Zhaobao"
de Liu Rui;
3- le style Wu de Wu Yuxiang de Taiji quan;
4- le style Sun de Taiji quan;
5- le Wudang Taiyi wuxing quan (Cinq éléments
du Suprême Un) de Jin Zitao;
6- le Wudan Shunyang quan (Yang pur) de Wang
Zhaohui;
7- le Wudang Taiyi shenjian men (école
de l'Épée Divine du Suprême
un) quangong;
8- le Taihe quan (Grande Concorde) de Zhou Zhongming;
9- le Wudang Hengshan pai (école du mont
Heng) Wushu de Zhang Kaiwen;
10- le shuishang Taiji quan (forme de Taiji
quan se pratiquant dans l'eau!);
1 1- le Xingyi quan;
12- le Liulu (six séries) quan;
13- le Wudang Qiankun men (école Ciel
et Terre) de Wang Shuzhang;
14- le style Zhang de Taiji quan de Wan Laisheng;
15' le style Zhaobao de Taijiquan;
16- les "cent huit mains" du Wudang
qinna (saisies et luxations);
17- les "cinq poings" du style Yang
de Taiji quan;
18- les techniques de poing des styles Sun et
Wu de Taiji quan;
19- le Wudang shengong (OEuvre divine) Taiji
quan de Wang Baoren;
20- le Wudang Longmen pai (courant Longmen)
xinyi men (école du Coeur et de la Pensée);
Wu Jianquan
21- le Wudang Taihe quan de Li Yongguang;
22- le Yunfang Taiji quan (Taiji quan taoïste);
23- le Ba zhi (forme basée sur le combat
au sol);
24- Yingxian quan le (Immortel caché)
25- le Lubu meihua zhuang (le Pas du cerf des
piliers de la fleur de prunier)
26- le Wudang Songxi liubu quan (la boxe des
six pas de Songxi);
27- les Sanshiliu Yin Yang Shou (les trente-six
mains Yin-Yang);
28- le Wudang Wuxing quan (boxe des Cinq éléments);
29- le Wudun Yin Yang Bagua zhang (cinq esquives
Yin-Yang de la paume des Huit trigrammes);
30- le Hunyuan zhang (paume du Chaos originel);
31- le Wudang tiezhang gong (accomplissement
de la paume de fer);
32- le Sanhuizhuan (trois rotations);
33- le Bagua zhang;
34- le Bagua lianhuan zhang (paumes enchaînées
des Huit trigrammes);
35- le Wudang ziran Sanfeng pai (courant naturel
de Sanfeng) Bagua zhang.
Comme l'indique cette longue
énumération, le courant moderne
de la boxe Wudang est hétéroclite
et composé en grande partie de pratiques
issues des boxes Taiji, Xingyi et Bagua qui
n'entretiennent qu'un rapport symbolique avec
le Mont Wudang.
Les secrets du temple de Shaolin
Boddhidarma
En fait, les arts martiaux chinois que nous
désignerons ici sous le nom de wushu,
ont toujours été liés à
l'histoire de la Chine. On trouve déjà
leur trace environ 3000 ans avant Jésus
Christ, sous le règne de l'empereur Huang
Ti. Mais il faut attendre le sixième
siècle pour voir apparaître le
Kung fu Wushu.
En effet, c'est en 527 que le moine indien Ta
Mo, plus connu SOUS le nom de Boddhidarma (Daruma
en Japonais), arrive au monastère de
Shaolin, dans la province de Honan. Le monastère,
qui se trouvait sur le versant nord du mont
Shao-Shih, avait été bâti
environ 150 ans auparavant par l'Empereur Su
Wen. Boddhidarma, vingt-huitième patriarche
bouddhiste, avait quitté l'inde pour
la Chine afin de transmettre le véritable
enseignement du Bouddha à la cour impériale
chinoise. Etant le fils du roi Sugandha, il
avait été formé sur le
plan des arts martiaux par le vieux maître
Prajnatra. En arrivant au monastère de
Shaolin, Boddhidarma trouva les moines en très
mauvaise condition physique, ce qui les empêchait
de pratiquer la méditation correctement.
Il leur donna des notions d'hygiène,
de médecine, et leur enseigna une série
de 18 exercices afin de maintenir leur corps
en bonne santé.
L'histoire et la légende s'accordent
pour dire que de là date la création
du Kung-fu moderne.( En fait, c'est la naissance
du courant de kung fu de Shaolin) En l'espace
de quelques siècles, les moines du temple
de Shaolin devinrent célèbres
à travers toute la Chine pour leur habileté
aux arts martiaux.
Cependant. Au douzième siècle,
Yueh fei, général de l'armée
impériale, créa le Xing yi quan,
un style interne basé sur son expérience
du combat à la lance. Un siècle
plus tard un moine, Zhang Sanfeng, imprégné
des principes taoïstes, fonda le Tai Ji
quan, probablement le plus populaire des styles
internes( du courant Wudang).
Avec l'apparition de ces deux systèmes,
la popularité du Kung-fu de Shaolin commença
à décliner
C'est alors qu'au 16e siècle,
apparaît Chueh Yuan. D'origine noble,
cet expert en arts martiaux rejoint le temple
de Shaolin et décide de réviser
les 18 mouvements de Boddhidarma. Il les amène
à 77 techniques. Puis il voyage à
travers la Chine afin de compléter ses
connaissances. Il revient au monastère
avec deux autres experts, Pai et Li. Ensemble,
les trois hommes mettent au point un système
complet de 170 mouvements, contenant 5 styles
qui, par la suite, serviront de base à
des dizaines d'autres.
Mais l'histoire poursuit son
cours en 1662, les Mandchous envahissent la
Chine et fondent la dynastie des Ching, mettant
fin à celle des Ming.
L'empereur Kang Hsi, craignant des révoltes
menées par les moines, décide
de détruire le monastère de Shaolin.
Cinq moines seulement échappent au massacre.
Ils fondent une société secrète,
la Triade, dont le mot d'ordre est : "chasser
les Ching, ramener les Ming". Jusqu'en
1811, des centaines d'organisations semblables
voient le jour. Leurs membres sont tous des
experts en Kung-fu. Décidés à
chasser les Mandchous qui usurpent le pouvoir,
les partisans des Mings réalisent qu'ils
ne pourront pas arriver à leurs fins
tant que les étrangers (Allemands, Anglais,
Français Américains et Japonais)
installés en Chine soutiendront la dynastie
en place. Ils décident donc de jeter
les barbares à la mer". C'est en
1900, la fameuse "révolte des Boxers
". Une armée composée d'experts
en Kung-fu assiège la partie de Pékin
où résident marchands et diplomates
étrangers. Après 55 jours de siège,
une force d'intervention formée de soldas
anglais, français et américains
arrive à temps pour sauver la communauté
occidentale. La révolte des Boxers est
noyée dans le sang. Des milliers d'experts
en Kung-fu périssent sous le feu d'une
armée moderne qui bénéficie
en outre d'un armement bien supérieur.
En 1949 lorsque Mao Tsé Toung prend le
pouvoir, de nombreux maîtres quittent
la Chine et partent s'installer a Taïwan
avec Chang Kai Tchek. D'autres préfèreront
aller à Hong-kong pour rejoindre des
parents éloignés. Ce qui explique
qu'aujourd'hui, le Kung-fu se trouve dispersé
en trois centres essentiels :
1. La Chine Populaire (où il a longtemps
été interdit).
2. Hongkong.
3.Taiwan, où de nombreux grands maîtres
vivent depuis 1949.
On admet qu'il existe en Kung-fu
environ une centaine de styles de base, ce qui,
avec leurs variantes, nous amènent à
plus de 350 styles différents. Même
les Chinois s'y perdent !
Par exemple le style de la "mante religieuse",
créé par Wang Lang au 17e siècle,
s'est divisé par la suite en
- la mante à sept étoiles
- la mante au lotus
- la mante aux 6 combinaisons
- la mante de la porte secrète
- la mante à l'anneau de jade
- la mante aux 8 pas
- le Tai Chi de la Mante
- la mante rigide
Et j'en passe !
Partant des même bases,
chacun de ces styles insiste sur un point particulier.
Ainsi, la "mante aux lotus" se caractérise
par un enchaînement de cinq coups de poing
semblables aux cinq pétales du lotus
; la "mante de la porte secrète"
se distingue par des attaques portées
avec le coude à courte distance en posture
très basse. Et ainsi de suite.
Parmi toutes ces écoles, une majorité
se rattache au monastère de Shaolin.
Souvent, cette appellation est purement nominale
et le style n'a aucun lien réel avec
le fameux temple. D'après la légende
au dix-septième siècle, le monastère
de Shaolin assiégé par les soldats
mandchous fut détruit par un incendie.
La plupart des moines périrent dans les
flammes. Mais quelques-uns réussirent
à s'échapper. Parmi eux, les Cinq
Anciens, qui étaient chacun maître
d'un des styles du monastère : la nonne
Ng Mui, le maître de Zen Chi Shin, Pak
Mei et Fung To Tak, deux maîtres taoïstes
et Miu Hin, un disciple de Shaolin. Ils parvinrent
à s'enfuir avec une poignée d'élèves.
notamment Hung Hay Kwun, Luk Ah Choi et Fong
Sai Yuk. Recherchés par les Mandchous,
ils prirent de fausses identités et se
dissipèrent à travers Chine. La
nonne Ng Mui fut à l'origine la création
du style Wing-Chun, Hung Hay Kwun et Luk Ah
Choi fondèrent le style Hung Gar.
Enfin Fong Sai Yuk créa le style Hou
Sing Chun (Five Pattern), basé sur l'observation
du tigre, de la grue, du serpent, du dragon
et du léopard. D'après la légende,
c'est ainsi que Ies différents styles
de Shaolin se diffusèrent à travers
la Chine.
Par la suite de nombreuses sociétés
secrètes virent le jour, telles les Triades.
Le but était le renversement de la dynastie
Mandchoue. Pour se reconnaître les uns
des autres, les membres de ces sociétés
secrètes faisaient référence
au temple de Shaolin. Comme la plupart d'entre
eux étaient des experts en Kung-fu, le
nom Shaolin fut bientôt accollé
à celui leur école : Shaolin Tang
Lang, Shaolin Hung Kuen. etc... C'est pour cette
raison qu'aujourd'hui, la majorité des
styles de Kung-fu se nomment Shaolin. A Taiwan,
Si l'on demande à un sifu rencontré
par hasard quel style il enseigne, il répondra
presque sûrement : "Shaolin".
Si on l'interroge davantage, il précisera
: "Shaolin du Nord" ou "Shaolin
du Sud".
En Bref :
Les styles internes insistent
davantage sur la respiration, le calme de l'esprit,
le développement de l'énergie
interne (Ch'i). Ils préconisent la défaite
de l'adversaire à l'instant même
où il attaque, en utilisant son énergie
pour la réduire à néant.
Les styles externes mettent l'accent sur le
développement physique, la musculation,
la force des coups et la rapidité d'exécution.
En fait, cette classification interne externe,
dur et doux, est assez simpliste.
De nombreux styles de Kung-fu
sont formés par une combinaison de deux
systèmes. La plupart préconisent
d'ailleurs l'utilisation du dur contre doux,
et du doux contre le dur.
En général, les Chinois divisent
les différents styles de Kung-fu en deux
branches principales Nord et Sud d'après
leur lieu d'origine. Chaque branche se subdivise
en 2 groupes rigide et flexible, ce qui est
plus réaliste que dur et doux. Le groupe
rigide met l'accent sur des postures assez basses,
avec des coups de poings puissants dans le Sud,
et des coups de pieds dévastateurs dans
le Nord. Le tout étant destiné
au combat à courte distance, aussi bien
dans le Nord que dans le Sud, avec des postures
plus hautes. Suivant cette classification, le
Wing Chun est un style flexible du Sud, alors
que le Chang appartient à groupe rigide
du Nord.